L'art et la manière - "L'amour dure trois ans" croit savoir Frédéric Beigbeider...

"L'amour dure trois ans" croit savoir Frédéric Beigbeider...

Avec 99F on a un peu plus parlé de lui. Titre vendeur, type vendeur, Frédéric Beigbeider est surtout devenu vendu grâce à la télévision, notamment chez Thierry Ardisson où sa super coupe de cheveux a fait un tabac. Du coup son livre s’est vendu comme des petits pains, et tout le gratin parisien a applaudi de ses deux mains le coup marketing génial de cet écrivain venu de la pub. On parlait de créatif dans la pub, tout le petit monde des recalés des arts qui végétaient, et végètent toujours, dans des jobs minables sans commune mesure avec leur « talent » autoproclamé s’est reconnu dans le personnage. « Et alors, j’écris à Gala, mais je prépare un roman… Oui, même que je cracherai dans la soupe… Et on reconnaîtra mon génie ». Beigbeider symbole d’une époque, comme l’apéricube l’est de l’apéritif. Ardisson sait mieux que quiconque débusquer les tendances. Il a compris une chose : trouve les frustrations de notre société, et ainsi tu auras toujours un coup d’avance pour débusquer celui qui aura du succès demain. « Ici tout le monde en parle, les frustrés parlent aux frustrés ! ». Et si ça ne suffisait pas, son émission mettra un gros coup de fluo sur ce qu’on n’a pas bien vu. Ardisson, et il n’en est pas peu fier, a été le premier à la télé à débusquer le filon, déjà has been deux ans après son apparition, des écrivains têtes à claque, une de ces nébuleuses de la ligue des demeurés intergalactiques. Qu’est-ce qu’un écrivain tête à claque ? L’écrivain tête à claque à du fric et n’a pas honte. Il n’a pas forcément fait grand chose pour mériter ce fric. Il peut être de très bonne famille par exemple. Ou alors il a créé une start up et l’a vendu au bon moment. Depuis il s’ennuie. Il s’ennuie et s’ennuie encore. D’autant qu’il fréquente des gens comme lui, des publicitaires qui se foutent du monde parce que la phrase qu’ils ont pondu a permis de vendre tout un paquet de merde à cette masse de con qu’est la France d’en bas. L’écrivain tête à claque s’emmerde. Les blondes sont des pétasses. Les brunes lui prennent la tête avec leurs grands airs d’intellos : « Elles ne savent pas rire ». Quant aux personnes connues se la jouent : « Ce petit con se la joue parce qu’il a passé trois jour dans un loft… Moi ça fait trois ans que je suis dans le mien !!! ». Le concessionnaire Porsche, pour sa part, est un sale connard qui met trois plombes à faire venir d’Allemagne ses putains de pièces détachées, et ça fait chier « merde », faut se trimbaler dans une BM Série 3 comme les petits merdeux de cité. « Est-ce que j’ai une gueule à porter du Lacoste hein, est-ce que tu m’as bien vu ? » demande-t-il à son interlocuteur en montrant la griffe Armani de son veston. Bref, l’écrivain tête à claque se sent écrivain tout d’abord parce qu’il habite Paris, ensuite parce qu’il a plein de misères à raconter sur un ton sarcastique, en chiant sur le monde de toutes ses tippes. C’est pour cela qu’il fait des phrases courtes. Il n’y a rien à ajouter en général. « Triste monde ! » en page 2, faut le reconnaître, ça en jette dès le début, et c’est « si terriblement vrai ».

Alors Frédéric Beigbeider, entre deux défonces a eu cette terrible lucidité : « L’amour dur trois ans ». Tout un thème, pour tout un livre : « Je veux te foutre dans le crâne mon dernier slogan pub : « L’amour dure trois ans » ». Il aurait pu choisir « Trois semaines », « Trois siècles », voir « Trois trimestre ». Parce qu’au fond c’est vrai que souvent il ne dure que trois trimestre, qu’après mille réprimandes du genre «Peut mieux faire, on attend mieux au prochain trimestre », il arrive qu’au mois de juin il faille faire une croix sur les belles vacances en couple prévues à Saint Trop…

En tout cas, après lecture du début du livre de Frédéric, j’en arrive à ce constat : si l’amour dure trois ans, la lecture dure trois pages. Pas une de plus. Il faut bien que mon chat puisse de temps en temps se faire les griffes.

PS : Je tiens à préciser à la personne, qui au sujet de ce dernier développment de mon texte, menace de faire connaître ces faits à la SPA, que je ne nourris pas mon mini-tigre avec des livres indigestes, et que ceux-ci ne font qu'office de grattoir.

PS-2 : On me le signale, et c'est un scoop, il semblerait que le prochain livre de Frédéric Beigbeider prenne pour titre : "Mon émission sur Canal+ dure trois jure et je dois passer chez Ardisson pour soigner mon désir irrépressible de passer à la télé". Mais il est fort probable qu'avant sa sortie dans les gares le titre soit un peu raccourci...

Retour page principale

Sommaire des textes

Qu’est-ce que « L’art et la manière… » ?

Participer, écrire sur le site

Etre tenu au courant des nouvelles publications sur le site ?

Ecrit par Wandess, le Jeudi 23 Septembre 2004, 06:56 dans la rubrique "Z".

Repondre a cet article

Commentaires :

Genie

23-09-04
à 08:43

Je dirais, juste au pasage, que tu es un être bien méchant de critiquer la merde qui sert de lecture quotidienne à des milliers de gens, de critiquer ainsi un homme qui en inspire tant.
99 F n'est pa le premier livre de Begbeider... il en a fait d'autres avant, qui lui ont aussi permis de se faire connaitre.

Personnelement, j'ai lu 99F jusqu'au bout car j'en étais contrain et forcé par mes professeurs au titre du Goncourt des lycéens. A mon prof de français, dans le résumé, j'ai marqué "un sale gosse qui crache dans la soupe..." etc etc et j'ai eu 19. Comme quoi, même les profs de français de 45 ans rêvent de vivre à Paris n étant des grandes gueules.

Dernière chose, je crois que tu as oublié de parler des copains de B., personne qui si elles n'existaient pas, empêcheraient à B. d'être médiathiquement ce qu'il est.

mise en page par Génie