Elle est allongée dans les herbes hautes et je ne vois qu’elle. Le nez dans son bouquin. Ses Ray-Ban remontée dans ses cheveux. Le ventre sur la serviette. Je ne vois qu’elle. Elle en bermuda court et haut de maillot de bain. Je rentre du boulot et je ne vois qu’elle. De la poésie au fond de mon jardin. Une bulle de paix entourée de pâquerettes. J’envie les gens qui ne bossent pas. Je lui dis tout de go : « Je te déteste de m’infliger cela ! ». Elle se laisse mettre sur le dos. Mais cela ne peut pas durer. Il y a du boulot. Elle soupire en se demandant s’il est normal qu’elle s’emmerde encore à la quatre-vingtième page de Doggy Bag 1. Je hausse les épaules. Il traine dans la maison depuis des mois. Pas encore eu le temps de l’ouvrir. A part Amélie Nothomb et quelques palpitantes enquêtes du commissaire Maigret, je n’ai plus jamais le temps d’ouvrir un livre. « Il faut pourtant le prendre mon chéri, il faut pourtant le prendre… ». Je la laisse avec ses coups de soleil car le devoir m’appelle.
Un fichu journal d’école à boucler. Un paquet de merde à lire et à remplir. Les saloperies habituelles… La paperasse inutile que l’éducation affectionne Si j’ai le temps peut-être que je pourrai également corriger quelques copies… Je me mets face à l’ordinateur. Je la vois rayonnante dans le soleil, allongée dans le jardin. Après tout j’ai été inspecté le mois dernier. Je mets directement dans la poubelle les papiers de l’inspection. « Ça c’est fait ! » dis-je. Je me balade sur le blog de ma blogostar préférée. Celle qui bronze dans mon jardin et reviens en murmurant qu’elle va étendre le linge. J’en profite pour lui demander si elle n’en a pas marre d’écrire aussi bien.
_ Tu veux des cours de rattrapage ? me demande-t-elle en passant.
_ Quand j’ai le temps je t’appelle…
_ Ouais et peut-être qu’on en profitera pour se faire une bouffe…
Elle est déjà en train d’étendre le linge. Un ange. Et je vois des rubans de tissus flotter de l’autre côté de la fenêtre. Elle me surveille du coin de l’œil. Puis elle reprend sa place sur sa serviette de bain au milieu des herbes hautes.
Décidément je n’aime pas travailler. Je me perds et je lis ses derniers posts de la journée. Je ne sais pas décrocher.
à 10:04