mise en page par Génie

Paul-Henri a vu de la lumière. Alors il est entré. Son grand-père disait : « Paul-Henri, j’ai pas mes lunettes, dit moi ce qu’ils jouent au Magic Ciné ? ». Le grand-père de Paul-Henri allait au même cinéma que Pierre Tchernia donc. Et chaque fois que Paul-Henri voit Pierre Tchernia àa la télévision, Paul-Henri se dit qu’il voit bien peu souvent son grand-père. Paul-Henri se rappelle que la vie est injuste, et que dans un monde bien fait les gens qui passent à la télévision mourraient avant les grands-pères. Paul-Henri rêve parfois de ce monde. Les dictateurs mourraient de migraine, les présidents de Etats-Unis en mangeant un Breitzel, les présidents de la France en grimppant la roche de Solutrée pour faire les malins, et leur suivant en chaussettes en matant les minettes en deux pièces sur la plage. Paul-Henri est pour une mort adaptée pour tous ces gens qui nous empoisonnent tant. Ardisson mourrait sans plus jamais pouvoir mettre un blazer noir car il serait atteint d’une maladie incurable du cuire chevelu qui l’étoufferait un jour sous une couche épaisse de pellicule. Quant à Arthur, il s’étranglerait un jour à trop parler du nez. De temps à autre Paul-Henri appelle de ses voeux la naissance d'un nouveau Dieu qui rendrait une justice plus expéditive que ces anciens dieux qui n'existent pas.

A la queue devant le méga UGC-CGR-Maxi Gaumont, Paul-Henri repense à cela. Il est pris de bonheur. Si seulement, lorsque le journaliste de Paris Match est venu le photographier sautant du balcon pour rejoindre Flavie dans la piscine juste en dessous, Benjamin Castaldi s’était fracassé le crâne sur le rebord en pierre du bassin… Là, cela aurait fait une magnifique une : « Benjamin Castaldi s’est explosé la crâne, mais comme il n’avait pas de cerveau ça a été très rapide à nettoyer. Flavie s’est consolée dans les bras de Jean-Edouard». De temps en temps, de cette manière, Paul-Henri ne souhaite pas que du bonheur à son prochain.

Il entre enfin dans la salle. Il supporte la publicité. Une conne derrière lui est ravie. Elle semble adoré la réclame, et sur grand écran elle trouve cela encore plus excitant, sa langue ne cesse pas de raconter des conneries à son compagnon. « Elle est bien la pub Auchan, ça donne envie d’y aller ! … D’ailleurs je fais toujours les courses à Auchan, et c’est vrai que c’est bien Auchan…» dit-elle. Paul-Henri se demande si elle chantonne lorsqu’elle se serre du Nescafé, et si elle se sent heureuse, comme au cinéma, lorsqu’elle le boit. Paul-Henri a toujours pensé que le Führer aurait pu faire un Reich d’au moins mille ans s’il avait eu d’aussi bons publicitaires que l’Oréal et Nestlé. S’il avait eu une vision globale aussi, pensant à préciser aux Etats-Unis avant la guerre que la Tchécoslovaquie produisait des Skoda, que la Pologne n’était rien qu’un pays de personnes saoules, les Français des ingrats qu’il ne sert à rien de venir sauver, et les Anglais des fans de soccer. Depuis quelques jours Paul-Henri joue au jeu des différences, comparant la pluri-dictature des marques à une bonne vieille dictature traditionnelle. Il considère que depuis une dizaine d’année, mais il n’en est pas certain, nous avons assisté à un accroissement considérable de l’emprise des marques et des personnages publics sur notre inconscient. Surtout en ville. Paul-Henri lutte à présent pour sa survie en temps que Paul-Henri. Paul-Henri se rassure lorsqu’il tient des raisonnements frôlant l’absurde. Les gens raisonnable n’ont rien d’exceptionnels, ils vont en boîte, boivent beaucoup, font la fête pour se sentir animaux avant de revenir à des pensées saines jusqu’au vendredi suivant. Paul-Henri a décidé de ne jamais ressembler à quiconque ira à la Star Academy.

Devant lui un champion s’installe. Paul-Henri se dit que c’est ça le problème avec les films de Quentin Tarrentino, il faut partager la salle avec le public de Taxi, Armageddon, l’Olympique de Marseille, Ruquier et le PSG. Le zozo devant Paul-Henri semble ignorer que l’élégance serait se dispenser de l’existence des casquettes. Il paraît par ailleurs ne pas savoir que dans une salle de cinéma pour ne pas gêner Paul-Henri qui est assis derrière lui, il doit retirer sa casquette. Paul-Henri change de place.

Lorsque le film commence Paul-Henri rêve déjà qu’il kill Bill et le mec à la casquette. Ainsi que les gens qui squatte l’antenne et rendent impossible l’usage du téléviseur de Paul-Henri en dehors de certaines heures. Paul-Henri commence à se demande s’il est fait pour avoir des aventures dans la ville. Si la vie citadine lui convient.

Le film a commencé depuis cinq minutes lorsque devant Paul-Henri un autre sous-développé vient s’asseoir. Il port lui aussi une visière sur la tête, ça cache une partie de l’écran, mais il tire aussi au bout de sa main une pétasse au rire porcin. Les films de Tarrantino plaisent aussi bien aux pétasses et aux fans de tuning, aux adeptes du porno-cam et des films de c’est-la-fin-du-monde-sauvons -la-planète. Il y a des réalisateurs comme cela dont il faudrait mieux ne jamais connaître le public, sinon on n’irait plus voir leurs films. Paul-Henri se dit cela, et il n’a pas tort. Lorsque le faux sang commence à gicler, Paul-Henri est heureux. Il rêve aussi d’éclater quelques têtes. De réduire certaines personnes d’un ou deux membres. Voir plus. Paul-Henri regarde cela comme un enfant, comme devant un Tex Avery. Il rigole beaucoup. Sourit. A la fin de la séance il est apaisé. Il a eu sa poussée d’ultra violence durant le film. Le voilà de nouveau en paix. Il n’a plus envi de massacrer personne. Alors il se met à courir sur les trottoirs de la ville. Il court vers de nouvelles aventures, et il a bien raison.