Une amie, m’y avait déjà amené une fois. Tout au début, lorsque je venais d’arriver dans cette ville. Je lui avais avoué que je m’ennuyais, que je ne trouvais pas grand-chose à faire, qu’il me semblait nécessaire de sortir des livres. Parfois ainsi je crie à l’aide, rarement. De plus en plus rarement. Parce que souvent on ne me répond rien, ou mon interlocuteur hausse les épaules. Avant d’avouer qu’il est dans la même situation. Ou de hausser les épaules une seconde fois, signifiant par là qu’il est désolé pour moi mais qu’il ne peut rien faire et s’en moque bien, qu’il ne comprend pas ce que je viens de dire, ne le vivant pas lui-même. Il regarde parfois aussi ses pieds. Il se dit parfois aussi que nous sommes semblable, mais il n’aime pas parler de ces choses là, il tente lui aussi de ne pas se noyer, ou ne veut plus voir ni entendre cela. Elle n’a ni haussé les épaules, ni regardé ses pieds. Elle m’a offert une bouée. Elle m’a donné rendez-vous au cinéma. Un peu comme cette mère qu’elle va bientôt être, elle m’a proposé une de ces après-midi devant la toile, suivie d’un tour à la pâtisserie. La meilleure de cette ville m’avait-elle alors dit. Souvenir agréable d’un mois de septembre.
Edwige ne devait pas y travailler ce jour là. Je ne l’y ai donc pas vue. D’ailleurs ce n’est pas dans cette pâtisserie que je l’ai connue. Non, c’est dans le train. Un soir. Tard. En ne sachant pas qu’elle vendait des pâtisseries durant une partie du temps où elle ne prenait pas le train et ne lisait pas des livres pour enfant. Nous sommes les amis d’Harry Potter. Nous sommes amis grâce à lui. D’une certaine manière il nous a présenté l’un à l’autre. Il nous a aidé à nous parler. A nous parler pour la première fois. Si j’avais lu Libération à la place, ce jour là, je ne l’aurai sans doute pas connue. Ni dans cette pâtisserie très cher où je ne pense pas avoir les moyens de me rendre régulièrement. Où les vendeuses sont si bien habillées que j’en suis intimidé.
Elle a posé le paquet blanc sur ma petite table. Elle a retiré son manteau et l’a lancé sur le canapé.
_ Au dernier moment j’ai bien cru qu’un imbécile allait l’acheté, a-t-elle dit.
Régulièrement le pâtissier lui donne des invendus. Elle me montre un gâteau étrange et appétissant, un de ces petits gâteaux comme on mange les dimanche. Elle avait réussi à m’en ramener de toute sorte. Mais pas encore celui là. Elle m’en parlait depuis le début. Je lui ai tendu un couteau. Elle l’a coupé en deux.
_ Incontestablement c’est le meilleur. Celui que je préfère !!! s’est-elle exclamée en remettant ses cheveux derrière ses oreilles.
Nous avons éclaté de rire, observant notre moitié de gâteau dans notre assiette, attendant que l’autre goûte. Apparemment elle attendait que j’y aille le premier, peut-être pour dire si l’eau était bonne. Alors j’y suis allé.
_ Hum ! C’est clair ! j’ai fait.
_ Ah tu vois… J’avais pas raison ?
_ Si si !!!
_ Bien contente qu’on soit d’accord…
_ Et comment !
J’ai regardé la marguerite brodée au bas de son pantalon, j’ai ressenti un grand enchantement, comme à chaque fois qu’elle est près de moi, que je savoure ses grands yeux bleus en face des miens. Etre avec elle c’est comme avoir la tête dans son pull-over arc-en-ciel.
à 12:30