Le hasard fait parfois de drôles de choses. La paresse du rangement aussi. Et je m'arrête sur des papiers que je trie, me passe un expresso, allume une clope pour lire cette petite curiosité d'un ancien nuémro du Monde. Qu'est-ce qui m'accroche dans cette article. Son titre "Trente ans après son élection, le bonheur retrouvé de M. Giscard d'Estaing"? Sans doute. Très certainement cette association, cette remonté dans le temps... "Trente ans après...", et puis ce mot : "Bonheur". L'idée de retrouver. Le retrouver après quoi?
Et en effet en lisant l'article, il y a quelque chose qu'on retrouve... "Trente ans...". Je n'étais pas né. Mais je n'étais plus très loin. Ma préhistoire personnelle en quelque sorte?
"Giscard...". Et je revois les 504, les 505 Peugeot, les 4L, les images d'une France toute proche mais déjà si différente. Une France post-68. La libération sexuelle. L'époque d'avant le VIH. Les grands élans de l'époque que trente années ont étouffées : le socialisme, le féminisme, l'époque de ces luttes qui paraissaient encore justes... La cacophonie et enfin un Président qui avec Simone Veil donne enfin à la Frnace cette loi moderne sur l'interdiction volontaire de grossesse et permet à des femmes en détresse de ne plus avoir besoin d'aller en charter en Grande-Bretagne ou en Suisse pour avorter.
Une époque retrouvée. Dans des images d'archives, des romans, des films de l'époque, des chansons... Des films plus récents comme "le Péril Jeune" ou encore la bien meilleure "Parenthèse enchantée"... Giscard est en partie cette époque. Cette parenthèse enchanté où tout change, tout est boulversé, les rapports homme femme, l'idée d'individu... Mais les conséquences ne se font pas encore sentir... La France n'est pas encore tombée sur la tête et il y a de vrais débats... Image encore : plus d'une se marre à l'idée de porter un soutien-gorge... des fleurs dans les cheveux c'est tellement mieux! Vu d'ici, vu de 2004, tout cela a l'air tellement doux...
Il y a trente ans Giscard arrivait au pouvoir. Depuis il a toujours été le seul Président français à ne plus être au pouvoir mais à être là. Elu très jeune, pour ses idées progressistes à l'époque, il incarnait et on l'a souvent oublié, une France plus jeune, une façon d'exercer le pouvoir moins monarchique. Il est le seul Président de la Vème République à ne pas s'être auto-proclamé monarque. Il est lui aussi une parenthèse. Après lui ce fut le retour des vieux Présidents, des Présidents s'accrochant au pouvoir jusqu'à leur mort comme Pompidou, De Gaulle, Mitterrant, enchainant les mandats jusqu'au possible comme Chirac le tentera certainement. On ne peut que déplorer cela. La France n'a pas comme d'autres pays la chance d'avoir d'anciens dirigeants ayant été au sommet qui soient encore là. Sauf Giscard. A lui seul il démontre que dans notre pays un Président peut quitter le pouvoir (au revoir!) touché par autre chose que la limite d'âge, et que donc l'alternance démocratique existe bien au sommet de l'Etat.
Giscard on a de la chance, on l'a gardé, il n'a pas connu d'accident d'accodéon. Chance donc que ce petit article nous apprenant cette fête entre anciens amis du Président pour se remémorer cette vistoire électorale il y a trente ans.
Il y a cette belle déclaration. Il évoque ce jour de bonheur que fut le 19 mai 1974. "Trente ans après, dit-il, on retrouve ce goût de bonheur qui a résisté et rafraîchi au passage du temps". Il conclut son propos en souhaitant que la France retrouve, elle aussi, "le goût du bonheur". Car il n'a pas tort... Elle l'a sûrement perdu.
d'après un article de Jean-Baptiste de Montvalon
à 19:19