Il ne me fait pas mal aux poings, même si je n’ai pas de gants. Il ne me fait que du bien. Voilà le sous sol rangé. Il ressemble à quelque chose. Il ne manquera bientôt plus que quelques posters ou des trucs du genre. Voilà mon antre en formation. Un peu d’ombre ne fait jamais de mal. Comme de grosses doses de rock à fond. Américain de préférence. Pas de paroles ou tout comme. Justes quelques mots. Et je frappe ! Le sac se balance au bout de mes poings. Un côté million dollar baby. Il faut croire que j’ai quelques bons coups à rendre. Ouais je frappe de toutes mes forces sans gants mais ça me fait plus de bien que de mal. 3tu veux quoi toi hein ? Tu veux quoi ? Tu me cherches salopard ! Tiens viens là que je te rende la monnaie connard ! ». Je lance mes poings à la Ryan Atwood.
J’ai bien essayé de hurler dans les bois. J’ai bien essayé le Xanax en générique. J’ai bien essayé les techniques zen. Avec effet sur l’instant. Et le lendemain ? Continuer à prendre des médoc pour aller bien, pour tenir, alors tout autour de moi me donne envie de frapper un bon coup, de poser des bombes, de jeter des claques ici ou là ? Ecrire c’est bien ce qu’il me reste. Sur le web de préférence. Sur le papier cela reste mort et c’est déjà presque enterré. A quoi bon hurler si personne n’entend, s’il n’y a pas de réaction ? Il y aura bien un lecteur à passer par là, à comprendre… Ou pas… Peut-être un bon conseil qui sait. Sinon il reste ces nœuds qui surveille le web, j’ai tapé poser des bombes, et je le réécris, il va bien y a voir des mongols pour prendre cel au pied de la lettre. Les mongols c’est pas ce qui manque de nos jours… quoi que je dis mongols… Mais sont-ils les plus frappa-dingues ? Ils divent bien soupirer derrière leur écran en pensant au soleil de la côté, à l’été quyi revient, et ils se demandent ce qu’ils foutent là. Vous nous protégez les mecs, c’est déjà pas mal. On est dans un monde de malades, mais rassurez vous je n’irai pas poser de bombe. C’est juste l’ambiance générale qui tape sur mes petits nerfs. Passez à la page suivante, il n’y a pas de risque par ici. J’ai ce qu’il faut au sous sol. J’ai un punching ball, ça devrait faire l’affaire pour l’instant.
C’est fou ce que donner des coups de poings réveille en moi. Bien que je puisse supposer que la sélection naturelle, la loi de la jungle, ne m’aurait pas épargné, je me mets à en regretter certains aspects. Comme ce devait être bon à la préhistoire (programme de CE2, ma classe quoi…) lorsqu’une inspectrice venait vous inspecter dans votre classe, de lui tordre le cou à la moindre intonation vexante dans sa voix… Sûr, je ne descends pas de ce singe pacifique qu’est le bonobo. A moins que l’inspectrice me montre son cul, j’aurai peut-être pensé à autre chose pour arrondir les angles…
Mais quel drôle de progrès tout de même. Est-ce que baisser gentiment les yeux, la jouer gentil, avec au fond l’envie de bastonner, mais prendre après un cachet, est-ce que cela est mieux que de balancer son poing et de régler les choses de façon naturelle.
Certes c’est une femme me direz vous. Mais j’en ai eu des hommes venu me faire le préchi précha. Venir du haut de leur âge me remonter les bretelles. Là on est d’accord, il ne s’agit plus de frapper une femme, c’est déjà beaucoup plus clean non ? Alors imaginons qu’au lieu de fermer gentiment ma gueule je lui défonce sa tronche ? Après tout n’est-ce pas la logique de l’espèce ? Les plus jeune au bout d’un moment écartent les plus âgés du pouvoir. Est-ce que vraiment ce serait si terrible un tel ménage, je dis cela, maintenant, en ce moment, alors même que nous connaissons cette actualité révoltante, où des hommes de pouvoir, des vieillards, veulent sacrifier des jeunes pour les envoyer au front redresser le pays en se faisant détruire par la machine... ? Oh on en voit des biens beaux du haut de leur stupidité dire qu’ils sont pour… Ils quémandent un job… Demain ils bosseront, et devront en plus quémander aux restos du cœur, mais ça ils ne le voient pas… L’espèce a donc bien étrangement évolué. Je frape un sac. Il faut remplir des papiers et des sourires, se courber devant le chef pour passer et obtenir le droit de vivre décemment. Est-ce qu’un bon crochet du gauche vous qui comme moi avez vu Peter Pan et Fight Club, ça ne vous rajeunirait pas ? Est-ce que ça ne nous aiderait pas à nous tenir un peu moins vouté, un peu plus droit ?
Et là c’est en plein dans le sac, c’est l’inspecteur qui vole… Quoi, elle ne te plait pas ma séance de production d’écrit ? Ah oui, elle ne te revient pas ? Okay gars, remonte les manche de ta chemise, on va voir qui a raison…
A trop vouloir jouer la loi du plus fort, cher puissant, petit lâches proches du pouvoir assis confortablement dans vos fauteuil à 120 euros en skin, made in china, faites tout de même gaffe qu’une autre loi du plus fort ne vienne pas remplacer la votre. Si un agneau tel que moi le pense, je peux vous promettre qu’il y en a des paquets qui sont prêts non pas à vous envoyer un coup de poing. Ils ne s’en tiendront pas là. Ils vous couperont en morceau, danseront sur vos restes avant de les dévorer !
Laurine vient me sortir de ce bourbier avec une Tequila. Elle a entendu mon délire, mais c’est loin de la faire marrer. « Heureusement qu’Ophélie n’est pas là pour entendre cela » murmure-t-elle. Le sac bouge encore. Dernières traces, pour l’instant, de mon défoulement de haine. Je sors une plaisanterie mais elle ne rigole pas. Je n’en ai pas très envie non plus. Si tout ce que je sais, si tout ce que j’ai appris ne me permet pas de me contenir mieux que cela, qu’est-ce qui va se passer la semaine prochaine ? Je n’ai pas quinze ans. J’en ai vingt-huit. Aucune sociologue ne pourra me parler d’effet de groupe. Ni de bourrage de crâne à trop regarder la télévision. Je suis un de ces cons qui paient la redevance pour avoir une télévision dans le salon mais ne la regardent pas. Pas de « Tueur né » pour me bourrer le crâne. Ni de moquée Oussama Ben Laden dans le coin pour m’occire le cerveau. Pourtant parfois je vire grave. On va vers Orange mécanique. Tout droit.
Heureusement je songe soudain à la voix de Jean Louis Aubert… nos troubadours à nous… La voix douce et chaleureuse Jean-Louis… « Je veux te parler de l’arme de demain… enfanté du monde tel en sera la fin, je veux te parler… De toi… De moi ! ». Je t’écoute Jean-Louis et j’ai envie de pleurer. Je ne veux pas devenir une bombe humaine. Je ne veux pas.
Fiction… Qui n’est ni tout à fait faux, ni tout à fait vrai. Qui aurait pu être… Ne l’a pas été, ou n’a pas été loin de se produire tout à fait. La réalité est elle-même parfois une fiction. Et la fiction une réalité……….
