Entre la poésie et le reste...
Une fois de plus le printemps revient. Et cette fois ci c’est vraiment parti. Les jonquilles ont sorti leur tête jaune. Le machin moche avec de grandes branches fait de jolies petites fleurs blanches comme on n’aurait pas deviné. Le truc au trois quart mort sous le volet gauche de la cuisine ressemble de nouveau à quelque chose avec ses boutons d’or. L’herbe envahie le jardin. Je vais devoir penser sérieusement à me sortir les doigts du cul et descendre à la cave avec pour mission d’en remonter la tondeuse à gazon. Et ensuite essayer de comprendre comment fonctionne ce délirant engin.
La nuit retombe malgré tout. Dans une certaine idée de douceur apaisante. J’en ai bien besoin. Je vais prendre une bière sur la terrasse. Je regarde le fil à linge vide. L’air de rien ça me donne des idées pour faire sécher le linge autrement qu’en posant les vêtements sur les radiateurs. Première petite bière comme ça peinard, juste un pull over sur les épaules. Il fait malgré tout un peu frais. J’ai mis pas mal d’idées de côtés. Je ne me soucie plus de mon inspection pour ce vendredi. Il y a un moment où il faut prendre des décisions dans une vie. J’en ai assez fait à présent. Je ne reçois pas la reine d’Angleterre après tout. Les gosses apprennent dans ma classe. Je ne crois pas que ce soit de faire des montagnes de papiers, des fiches de séances, des fiches de séquences, recopier comme un perroquet des morceaux entier des programme de l’éducation nationale, qui va faire progresser mes élèves plus vite. Au mieux cela accélérera la déforestation de la forêt amazonienne et accroitra le dégoût que je peux parfois ressentir de faire un aussi joli boulot entouré d’autant de cons … Je ne vais pas passer ma vie à faire plaisir à des personnes qui ne sont pas fichues de se contenter de se masturber avec leurs doigts ou leurs mains quand même! Ouais, c’est dingue ce que ce jardin et ce ciel peuvent être beau. Ouais, c’est dingue tout ce qu’on peut nous faire comme mal pour nous saloper l’existence et enlaidir ce monde, ainsi que nos existences.
Il semble que la lutte soit entre ceux qui comprennent quelque chose à la poésie et les autres. De tout temps on a trouvé des cons pour bander au levé des couleurs, des abrutis pour se palucher gaiement en écoutant le CAC40 grimper, des types mouiller leur froc de plaisir en faisant régner leur loi sur d’autres, en leur faisant remplir de la paperasse inutile ou en décidant à 300 km de là de faire couper toute une forêt.
Il doit être l’heure. Les tronçonneuses se taisent au loin. Je me sens seul lorsqu’Ophélie n’est pas là. Ce soudain silence me le rappelle si nécessaire. J'ouvre une autre bière en attendant Laurine. Mais c’est Anaïs que j’aimerais voir arriver...
Il manque un cheveux pour que la vie soit bien faite.
Fiction… Qui n’est ni tout à fait faux, ni tout à fait vrai. Qui aurait pu être… Ne l’a pas été, ou n’a pas été loin de se produire tout à fait. La réalité est elle-même parfois une fiction. Et la fiction une réalité……….