Ballade en forêt main dans la main avec cette chaleur qui fait tant de bien, qui fait suer avec délice. Aurélia a pris de jolies couleurs de pâtisserie. Moi aussi paraît-il. Sans doute pour souligner que depuis notre rencontre je ne m’alimente que d’elle*. Retour au frais de la maison. Le chat dort devant la porte. Très agréable semble-t-il, les oiseaux peuvent se poser à deux mètres de lui sans qu’il ne remue la queue.
Aurélia complète la liste des courses. Non, elle se débrouillera très bien toute seule, elle a touché ses chèque, non elle s’en sortira avec sa propre carte bancaire. « Va travailler ! » rigole-t-elle en me conduisant jusqu’à l’ordinateur. Elle me regarde quelques minutes, l’épaule appuyée dans le chambranle de la porte. Difficile pour moi de me concentrer. Enfin elle rabat ses lunettes de soleil sur ses yeux. La voilà partie. Si je tends l’oreille j’entends presque sa vieille R11 grogner d’être ainsi réveiller par un si bel après-midi.
Une bière. Je règle quelques petites choses pour ma classe. Rien de bien glorifiant, mais c’est fait.
Je vais voir ce qu’elle a écrit sur son blog. Amusant, étrange également, toutes ces petites choses que nous nous disons par l’intermédiaire de nos petits écrits. Comme des post-it sur un frigo. Rien de conscient. Je ne suis pas le destinataire. Elle ne l’a pas non plus lorsque j’écris. Mais il reste toutes ces petites choses qu’on oublie parfois de se dire, ou qu’on a cru se dire et qui là, posés comme sur du papier, sont plus simple à observer.
Il n’y a pas de jalousie chez moi. Du moins je ne le crois pas. Mais je ne peux m’empêcher de me demander comment son blog fait plusieurs milliers de visiteurs par jours. Elle écrit bien. Elle ne cherche rien. Elle écrit un blog. Nulle envie chez elle d’écrire un jour un roman, ou dans très longtemps. Elle est bloggeuse. Point. Avec facilité. Lorsque je la vois écrire, j’ai du mal à imaginer que c’est ensuite ce que je lis. Les mots semblent lui sortir tout seul du bout des doigts. Elle qui a si souvent tant de mal à trouver les mots qu’elle veut lorsqu’elle parle. Parfois tellement silencieuse, tellement mystérieuse. Mais on retrouve une part de ce mystère en la lisant.
Et je m’étonne aussi à chaque fois en voyant le nombre de commentaires laissés sur son blog. Lorsque j’en ai si peu. Il semble que ce qu’elle dit parle très directement aux gens qui la lisent. Ils se sentent l’envie de lui répondre. De discuter. Il ya toujours dans ses textes ce qu’il n’y a pas dans les miens je crois, la possibilité de se les approprier, ou une sorte d’ouverture vers une discussion.
Etrangeté de la part d’une Aurélia qui si souvent est lassée par les bavardages de notre entourage, par les propos inutiles, les futilités et les banalités. Communication facile de la bloggeuse qui reçoit compliment sur compliment avec grâce, alors qu’au quotidien elle les balaie d’un revers de main en rougissant. Persuadée lorsqu’un homme la regarde que quelque chose cloche sur sa jupe ou ses chaussures. Alors qu’il ne fait sans doute que l’admirer.
Ses yeux hésitent, ils évitent ceux de la boulangère. Aurélia est troublée. Celle qui écrit n’est pas une autre, mais face à l’écran elle ne détourne pas le regard. Je prends un plaisir toujours plus grand à la lire. Comme vivre à côté d’elle.
Fin en queue de poisson, il faut se remettre au travail sans tarder. Qu’il est dur de travailler et aimer en même temps…. Je crois que cela va bientôt faire pas loin de trois-cent jours que je fais chaque jour le même constat.
*Jolie parole d’Axel Red je trouve (Album A tâtons)
à 15:03