Un nouveau week-end sans elle. Apprendre à faire sans ses bras. Quelle est la notice lorsqu’on se retrouve seul chez soit ? Elle avait raison… Les habitudes viennent vite ! J’aimerai ce soir la prendre dans mes bras. Etre serrés dans les siens. Faire à manger pour deux… Ma vie seul a cela de pénible qu’il n’y a personne que je vois, ou retrouve régulièrement. Personne à attendre. Personne avec qui partager chaque jour. Il y a des amis. Leur prénom est marqué dans l’agenda. Le 7, le 14, le 15, le 20, le 22… et numéro complémentaire le 12. « A confirmer, rappeler Laura. Proposer à Solenne de venir avec son con ». Alors je les vois ces amis. Tous les quinze jours pour les plus disponibles. Tous les mois, voir plus, pour les autres, et ceux qui habitent ailleurs en France. Il est loin le temps où je revoyais certaines personnes tous les jours. Où nous nous passions un petit coup de fil quand il y avait une indisponibilité. Très loin même pourrait-on penser. Luc appelait souvent. « Merde je l’aime… Je sais plus quoi faire avec elle ! - Non Luc t’es pas tout seul ! Allez vient, on va boire de la bière, manger des moules, des moules et puis des frites… - Et du vin de Moselle ? – Tout le vin de Moselle que tu voudras Luc ! Tu sens la force qu’il y a dans un verre de vin de Moselle Luc ? ».
L’amitié. Voilà ce que j’aimais. Pas de rendez-vous. Beaucoup d’improvisation. Jamais de politesse, de « je ne te dérange pas ? » dans le combiné. Se foutre de l’heure qu’il est. Et de ce qu’il y a dans les paquets de cigarettes. Se sentir appartenir à un groupe. A un ensemble. Et tout à coup, tous ensemble, être mille fois bien dans ce monde. Pour les jours où ça n’allait pas, les heures de déprimes, toujours une épaule, la main du pote qui s’abat sur celle-ci. Dissolution de problème par simple imposition. Remèdes miracles et biens connus. Petit verre entre amis. Un bon son, des chansons douces, agréables… Des gestes, des réflexes qui remotivent… Requinquent. Simple médication. « Et puis t’es pas tout seul ! Une gonzesse de perdue c’est dix potes qui reviennent ! ». Mais l’équation est devenue fausse. Personne au bout du fil. Le répondeur. S’il décroche, il ne me prêtera pas son oreille. « Il y a le film de la Une qui commence, je te laisse… On se voit le 29 ? ». Coup d’œil sur ce maudit agenda. « Rien le 29 ! ». Je raccroche. Le pire est que je sais pertinemment que le 29 je n’aurai plus envi de le voir. Là j’ai un truc dans la gorge qui ne passe pas, je me fous du 29 et du film de TF1. Pire, j’entends des voix… Johnny ? Merde Johnny est chez moi… De pire en pire. Et il chante en plus… « Seul, on est partout et toujours seul ! Des gens vous aiment vous entourent ! Mais on se retrouve quand même et toujours seul… Avec un trop plein d’amour !!! … Que l’on donne à une personne ! Une seule… Et qui au petit jour… Ohhhhh au petit jour, vous ABANDONNE !!!! Vous ABANDONNE !!!! ». Voilà, mes amis sont tous pris. Des biberons à donner. Des courses à faire. Des belles familles à visiter… Ils ont quelqu’un eux. Et besoin de personne (en Harley Davidson). Personne d’autre. Je suis un loisir. Une récréation. Une date dans un agenda. Cela leur plait comme cela. Alors j’augmente le son de ma chaîne. Je trinque les yeux fermés. Seul avec la voix de Johnny.
à 20:53