"C'est un rire intérieur.
Dehors, il ne fait pas chaud.
On est lundi, le ciel est gris
Et je suis tombé de mon lit.
Les nouvelles ne sont pas belles.
On les jette à la poubelle.
Quelle grisaille, quelle grisaille,
Et l'amour n'est plus qu'un petit détail.
Allons nous coucher.
Je me réveille au printemps.
Il fait doux, j'aime ce temps.
Les fleurs s'ouvrent et je découvre
Que ton corps est très excitant!
Décrochons le téléphone.
Nous n'y seront pour personne.
Loin des casse-pieds, sous le pommier,
Ça fait longtemps qu'on a oublié
D'aller se coucher,
Allons nous coucher.
La vie est courte: il faut vous allonger.
Oubliez vous et tout va s'arranger.
Pour du bon temps, votre femme vous attend.
Allez retrouver la belle au bois dormant.
Oui, ça c'est la nature qui appelle, et vous
Prenez la main de cette fille, elle
N'attend que ça et vous c'est pareil.
Demain il ne faudra pas pleurer.
Allez vous coucher,
Allons nous coucher.
Il est tard et je suis naze
Et je rentre dans ma case.
Je m'allonge sur un banc,
Ma fumée déroule son ruban.
Sur sa natte ou sous sa couette,
Pour moi la nuit sera chouette.
Je dormirai mieux demain.
Demain, j'irai me coucher dans le petit pré.
J'irais me coucher,
Allons nous coucher."
Thomas Fersen, in Le bal des oiseaux, 1993
Sur cette île le printemps est lumineux. Ballade en bicyclette avec tes frères et tes cousins. Rien que nous deux sur les pistes qui traversent les marées salants. Jumelles autour du coup pour aller regarder les oiseaux. Tu tentes de m’en apprendre les noms, je répète sur le même ton que toi. A quoi bon les retenir sans le timbre de ta voix ?
Ramasser à marée basse des coquillages sur les rochets. Les dévorer en fin d’après-midi avec tes parents en prenant l’apéro au vin blanc. Se retrouver à la tombée du soir, marcher jusqu’au phare. En profiter pour n’être plus que tous les deux tout la haut. Tes cheveux noirs et tes origines italiennes, ton sourire jusqu’aux oreille, ces silence lorsque tu cherches tes mots. La place que tu accordes à leur choix, même lorsque le vent souffle et que je ne les entends qu’à peine.
Je m’oublie dans les bras de Cécile, bien avant notre premier baiser. Je jette aux orties la grisaille, en même temps que mes peurs à la vue de ton corps si excitant. La vie est courte. Il vaut mieux ne pas en pleurer. Tu n’attends que cela. Et moi c’est pareil. Allons nous allonger. Allons dormir ensemble en ce bel après-midi. Demain rien ne sera plus pareil…
« La vie est courte: il faut vous allonger.
Oubliez vous et tout va s'arranger.
Pour du bon temps, votre femme vous attend.
Allez retrouver la belle au bois dormant.
Oui, ça c'est la nature qui appelle, et vous
Prenez la main de cette fille, elle
N'attend que ça et vous c'est pareil. »