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 Ecrits de la vie...   Fiction   Les aventures de Paul-Henri   Nouvelles   Z 

mise en page par Génie

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J'ai déserté les champs de bataille

Elle m’avait regardé, elle avait baisé ma bouche, joli moment, un frisson parcours sa peau, un autre parcoure la mienne. Quelques instant plus tard, est-ce qu’il a plu, elle me déclare qu’elle doit arrêter. J’ai le droit de la maudire. De ne plus jamais vouloir lui parler. Ne plus jamais pouvoir la voir. Elle juge que cela serait mérité. Elle tremble. « Si tu ne m’aimais pas, dis-je, je comprendrais… Mais je ne comprends pas ». Elle m’aime. Elle le répète. Je l’entends encore. Même deux ans après. Les apparences jouent contre moi. « Je t’aime, mais je ne peux pas rester avec toi… Je sens que je vais te détruire… - Tu ne crois pas que c’est à moi de dire si je veux être détruit ou non… - C’est parce que je t’aime que je ne veux pas te détruire, que je prends cette décision pour nous deux, et crois moi, elle me fait mal… - Alors change d’avis ! – Je détruis tous les hommes… Je détruis ceux que j’aime… Il n’y a que toi que j’aime à ce point… Mais tu es fragile et je ne veux plus te faire de mal. – Tu ne m’as jamais fait de mal… Sauf en ce moment… - Alors j’arrête au bon moment. Je t’en pris… Descends ! ». 

 

Ai-je fait une erreur ? Je regarde sa voiture s’éloigner, j’ai tout sauf le sentiment d’être un type fragile. J’espère qu’elle ne va pas se tuer. Je n’aime pas lorsqu’elle conduit dans cet état. Lolita est un précipice, elle a toujours plus ou moins déraillé. Elle a toujours bu que des verres de trop. Je ne suis pas aussi fragile que j’en ai l’air. Il me semble qu’elle se trompe. Mais les apparences ont toujours joué contre moi. Pas mal de monde se fiche le doigt dans l’œil bien profond à mon sujet.

 

Je me demande si cette année la neige tombera tôt. La rue bourdonne doucement. Des ambulances vont à l’autre bout de la ville. Elles passent toutes par là. La clope au bout des doigts je me sens comme chez un ami, reclus sur son balcon pour ne pas enfumer son appartement. Je me demande si j’aurai le courage d’aller chez le marchand de meubles acheter les deux fourre tout que j’ai vu, un vol d’oiseau passe sur les toits, mais je n’obtiens pas de réponse. Il me faudrait quelqu’un pour me suivre, quelqu’un qui m’aime. Qui viendrait avec moi. M’aiderait. Mais personne à l’horizon.

 

L’interphone retentit. Bob. Il me rend visite. C’est important. J’ouvre. Peut-être m’est-il envoyé par la providence ?

 

Bob vit avec Lo depuis la rentrée. Après des années de refus à tout compromis pour une vie en couple, elle a surpris tout son monde. Bob, on l’avait bien vu avec elle avant, mais tout cela semblait être de l’histoire ancienne. Jusqu’à ce qu’il l’emmène dans les îles au mois de juillet. Puis chez lui en septembre. Elle et ses meubles. Elle et les restes de son ancien studio. Il m’a semblé voir la nuit tomber. Nulle jalousie. Seulement Lo était la seule personne qui puisse me faire croire que nous avions encore vingt ans, que la mode n'était pas à ce mettre en couple à tout prix et sous le même toit. Mais les blés ont été fauchés depuis. La mode semble être à la vie à deux alors que je démarre la vie tout seul…

 

Bob est le second amour de Lo. Je suis le premier. Celui qu’elle ne doit pas. Du moins est-ce quelle dit. Une stupide histoire cela. Lolita est persuadé de détruire tout ce qu’elle aime. Bob est plus solide d’après elle. Même si elle s’en sent moins proche. Moi je lui fais peur. Parce qu’elle m’aime bien autrement qu’elle aime Bob. Je n’ai jamais réussi à démêler tous les fils de cette histoire, j’en ai même pas trouvé le Nord. J’ai renoncé à comprendre. Renoncé à tout. Lo ou une histoire passée parmi tant d’autres. Lolita comme ces autres vieilles carcasses d’histoires entassées à la casse des amours, Lo amour compressés par le temps, réduite sur un espace de trois fois rien pour la nécessité de l’histoire. Car il faut bien que l’histoire avance. L’histoire n’a pas que ça à faire que de regarder en arrière. On ne roule pas droit devant en ayant les yeux planté dans la vitre du rétroviseur. J’ai fait beaucoup pour me forcer à vivre ainsi, j’arrive presque à présent à ne plus jeter des regards par-dessus mon épaule.

 

Je lui propose un café. Il me dit que je suis bien installé. Mais il est trop tôt pour que je joue à lui faire visiter mon appart, et puis j’aimerai bien qu’il me dise enfin ce qui me vaut l’honneur de sa visite. Il y a quelques semaines encore j’appréciais bien ce mec. Lo l’avait choisi et pour cela je lui imaginais d’immenses qualités, que d’ailleurs en parlant avec lui je lui trouvais sans mal. A côté de moi je le voyais sans doute plus rassurant que je ne pourrai jamais l’être. Les épaules plus large, simple question de carcasse, de squelette, j'étais dans l'ensemble assez heureux que mon amie, abonnée de longue date aux plans galères, trouve un homme qui lui redonne le sourire. Autant avec moi et Lolita sur la barque on pouvait se demander qui la dirigeait, avec lui il ne devait pas y avoir le moindre doute. Bob n'est pas aussi beau que les mecs des pubs qu’on voit sur les autobus et qui vendent du parfum ou des strings, mais il a ce même air sûr de lui, cet air de gagneur, de grand décideur de sa propre vie, cette tête de surfeur vendeur de Vans. La gueule du mec qui n’est jamais surpris par rien, à par peut-être par les cadeaux à noël qu’il n’a pas commandé. Bob est plus carré que moi, je pense qu’il n’a pas l’air fragile, même si à Fort Boyard il crierait peut-être à la vue d’une araignée. Il doit bien y avoir une faille dans son apparence.

 

Jusqu’à ce matin donc, je n’avais aucun dégoût pour Bob. Sa visite me faisait plaisir malgré mon réveil à peine achevé. Il aurait juste pu amener les croissants.

_ Lolita t’a dit que je souhaitais que vous ne vous voyez plus quelques temps ? m’a-t-il demandé.

J’ignorais si je devais le savoir ou non. Mais ce ne devait pas être très grave.

_ Oui, dis-je. Elle va bien à ce sujet ? Parce que du coup je n’ai plus de nouvelles… Un sucre ou deux ?

_ Un et demi….

_ Comme moi dit donc !

_ J’aimerai aussi que tu cesses de lui envoyer tout le temps des textos… Ca nous dérange.

Il le dit de façon aimable. J’ignore si c’est forcé ou s’il ne se rend pas compte de ce qu’il dit. Si c’est ça le dur à cuir pas fragile que Lolita attendait, je suis désolé pour toi Lolita mais je crois que c’est pas gagné.

_ Tu vas arrêter ? me demande-t-il.

J’en suis encore à réfléchir à qui a flanqué une rouste à sa copine pour une histoire de malheureux textos, j’aimerai bien lui citer cet exemple, mais je retrouve ma référence et je préfère m’abstenir. On ne rigole pas de tout, ni avec tout le monde comme le dit grand-papa.

Je m’interroge. Dois-je aussi ne plus dialoguer sur internet avec Lo ? Dois-je demander à Farce Télécom de couper ma ligne? Lo est « mon numéro préféré ». Puis-je espérer de Bob qu’il me dédommage..? Enfin, sait-il que Lo lit mon journal ? Avant de se lancer dans sa grande aventures d’élimination de mon Moi de leur vie, a-t-il seulement réfléchi à tout cela, ou bien agit-il sans faire usage de cette chose visqueuse qui lui sert de cerveau ? Je ne veux pas le savoir. Une fois de plus je déserte le champ de bataille. Je ne m’amuse plus autant qu’avant avec les dingos, je les laisse se flinguer tout seul. C’est ma nouvelle politique de la vie. Adoptée à l’unanimité en session plénière le 1er septembre dernier sous le projet de loi personnelle « je déserte les champs de bataille ». Une politique du repos sans condition. J’ai d’autres chats à fouetter.

 

Il détourne la discussion. L’affaire semble close. Je vais me faire discret quelques temps. De toute façon il a tort, il finira bien par s’en rendre compte sans que je n’ai prononcé même un petit mot. C’est une question de mois ou de semaines.

_ Tu es bien installé ici, répète-t-il encore une fois.

Ce con n’a jamais voulu me voir chez lui, j’ai jamais été invité. Il a commencé à construire le mur de Berlin avant que je ne m’en aperçoive. Et cela tombera de la même manière.

_ Tu as quelqu’un en ce moment ?  me demande-t-il.

Réflexion faite, je crois avoir quelqu’un. Je viens de le décider. Il me semble que ce soit une bonne décision.

_ Elle est comment ?

Pas le temps de répondre à une question, que déjà une autre suit. Je suis sur TF1, je suis face à un lieutenant Colombo d’opérette. Tout est d’opérette de nos jours. Personne n’arrive au niveau du lieutenant Colombo. Bob est un minable, on le voit venir à des kilomètres. Et son cabriolet Peugeot c’est une 206…

_ Elle vit où ?

Je décide qu’elle vivra pas loin de chez moi. Pour les détails je pioche dans des journaux que j’ai lu sur internet. Elle aime les pains aux chocolats, Boris Vian, les fraises Tagagda et Sous le Soleil. Tout cela nous rapproche évidemment. Je l’explique très clairement à Bob. Elle est belle. Tendre. Souriante. Dans ma tête c’est très clair. J’espère que pour Bob ça l’est aussi. Nous nous sommes rencontré au « Paradiz Club ». Oui, ça s’écrit comme l’album d’Indochine. Quand j’invente, j’aime bien m’en rappeler après. Tout cela me permet d’éviter des erreurs. Bob est très content pour moi. Il sourit.

_ Comment s’appelle-t-elle ?

J’ai le choix. Beaucoup de prénoms plus ou moins exotiques me viennent à l’esprit. J’aime bien Natalia. Je sais pas pourquoi, j’ai toujours aimé ce prénom. Mais je décide, avant de répondre à Bob, de m’inspirer en ce tendre matin du fonctionnement de l’autocuiseur Seb. Je retire la pression. Je mets de la pression. Je retire de la pression. Je mets de la pression….

_ Elle s’appelle Lolita, dis-je.

Pression maximum. Cuit comment le Bob Lolita ???

 

(début décembre)

Ecrit par Wandess, le Lundi 22 Décembre 2003, 14:00 dans la rubrique "Ecrits de la vie...".


Commentaires :

  Alycia
22-12-03
à 16:21

Mouais....

Et il 'a cru ce primate ou pas? C'est un peu gros, moi à ça place j'aurai pas marché... Enfin bon, il a l'air bien balourd alors...

  Wandess
22-12-03
à 17:24

Re: Mouais....

Non il ne m'a pas vraiment cru, il a pris un air énervé... Etrange quand même. Mais comme j'ai pas dévié de ma trajectoire, le Bob a fini par devoir repartir perusadé que je l'avais berné, que je m'étais foutu de lui. Il pouvait quand même par repartir en ayant l'impression de gagner sur tous les tableaux non? Je pouvais pas le laisser repartir l'âme en paix tout de même!

  fabienland
27-12-03
à 14:58

Re: Re: Mouais....

Je vois que nous avons en effet quelques points communs (lolll). Moi aussi ai du arreter l'internet avec Elle, parce que pouvoir s'ecrire longuement meme sans se toucher équivaut a une relation à trois...Nous en sommes au texto, brefs et en pointillés, comme notre histoire. Souffrir est plus flatteur pour son ego et donne l'impression de vivre plus intensement..
Fabien