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mise en page par Génie

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Joséphine

Tout a commencé lorsque l'on ait sortis du Strandg. 20, 792 30, ville de Mora, Suède. Il était aux alentours de 21h, et la nuit nous tendait ses bras obscurs. A la recherche de tabac et de bière, nos pas nous ont conduits à une vieille station service aux abords de la ville. Continuant notre errance cigarettes à la bouche, bière à la main, on atterrit sur les docks encerclant le lac. On déambule alors, l’œil hagard, le regard vitreux sur les vieilles planches de bois moisies, en quête de filles. Ne trouvant rien si ce n'est quelques suédois bourrés, on décide de retourner à la station service faire le plein de bière, et c'est là que Nico croise le regard d'une fille assise parmi tant d'autre, sur un dock, face aux étoiles.

 

Alors il s'élance, s'envole, s'égare et va lui parler, me laissant dans une perplexité profonde, car je ne vois pas en quoi cette fille peut le mettre dans un tel état. Et voilà que Félix, mon compagnon de voyage, le suit, guidé par la même pulsion, par la même vision, étrange et poétique, que je ne comprends pas. Je le suis donc à mon tour, dans un équilibre relatif, et c'est alors qu'elle apparaît au milieu de mon brouillard, de mes ombres. Joséphine. En l'espace d'une seconde elle me fait oublier les démons qui s'agitent au fond des vestiges de mon cerveau.

 

Une pureté éclatante au milieu de cette scène lugubre, une apparition qui m'ensorcelle, me transcende, me fascine. Mon corps s'enflamme, mon esprit se dissout, je ne vois qu'elle. Et Nico et Félix sont dans le même état, je le sais, je le sens. Elle nous parle et sa voix nous pénètre de l'intérieur, son regard brûle le mien, je m'assois à côté d'elle, je la sens là à quelques centimètres de moi, et cela en est presque trop. Elle brûle ma confusion mentale, j'ai envies de m'envoler vers la Lune en la serrant dans mes bras. L'alcool s'égrène dans tout mon corps et elle me parle, et c'est de la poésie. J'ai l'impression de voir la Beauté Absolue, une sorte de soleil l'irradie et resplendit sur nous trois. Je ne peux détacher mes yeux des siens, je m'y noie volontiers, m'enfonçant au plus profond de son Ame, et bientôt j'ai l'impression que la Terre s'est arrêtée de tourner, que l'Univers ne repose que sur ce dock face aux étoiles. Une seconde ou une heure passe, je ne saurais le dire, mais notre quatuor forme une harmonie incroyable, qui brille au milieu de la Nuit. Le temps s'arrête, et nous la regardons, avec nos bières et nos cigarettes. Et l'on parle, et parle, on refait le monde, à son image, univers gracieux et pure. Félix se dit amoureux, il me chuchote à l'oreille qu'il est prêt à rester ici, à la suivre, et la contempler éternellement.

 

Quant à moi je ne sais ce que je ressens, tout est confus, je me sens perdu dans un espace où mes rêves deviennent palpables, loin de mes peurs, de mes doutes, de mes cauchemars et je ne peux que vivre ce moment dans tout son intensité, hypnotisé par cette présence qui me charme, me déroute, me séduit, me réconforte. Mais notre bulle de sérénité, de beauté, explose avec le retour au réel, une sonnerie de téléphone qui retentit et déchire notre transe chamanique. Elle se lève, et s'en va, téléphone à la main. On se regarde, encore empreint de cette bouleversante expérience. Elle revient et nous dit qu'elle doit s'en aller. On se lève et on l'embrasse, à la française, dernier contact avec le Pays Imaginaire, et la voilà qui disparaît au coin d'une rue. Je m'en vais à mon tour, avance le long des quais, m'enfonçant dans les ténèbres, et ni Nico ni Félix ne me retiennent, chacun s'en va, seul se blottir dans un coin du monde. Je vais me poser sur un autre quai, plus loin, plus égaré, plus perdu au fond des ténèbres.

 

J'allume une cigarette, et dessine son visage en ronds enfumés qui se dissipent lentement dans l'atmosphère. Je me sens seul, à la merci de l'alcool qui me monte au cerveau, et me fait pleurer. Je me suis endormis à ce moment là, allongé sur ce dock, au bout du bout du monde, mon sac faisant office d'oreiller, et les étoiles me recouvrant d'une douce couverture nacrée. Et j'ai pensé à elle une bonne partie de la nuit.

 

Ecrit par Lennon, le Jeudi 4 Décembre 2003, 10:31 dans la rubrique "Nouvelles".