Lorsque Mélodie m’avait annoncé qu’elle se voyait contrainte de me quitter, je m’étais demandé si j’allais passer plus de temps chez moi, si la vie ne s’arrêtait pas d’un coup, je n’étais pas malheureux, j’avais le sentiment que ça irait désormais mieux ainsi. Seulement je n’aime pas le vide, j’en ai même une peur terrible. Après elle je craignais de sombrer dans l’ennui, ne plus trouver que faire. En fait je me sentais fatigué. D’ailleurs je me sens toujours fatigué. J’ai entendu je ne sais plus qui, expliquant je ne sais où, que le secret à sa pleine forme et à sa bonne humeur était de ne pas fumer, ne pas boire, et toujours se coucher aux mêmes heures. Je fais exactement l’inverse.
J’avais rendez-vous le soir même avec Marielle. Je devais prendre le train pour aller la rejoindre dans cette autre ville beaucoup plus grosse que la mienne, plus bruyante aussi, plus dynamique également. Nous devions nous retrouver dans un bar. Sur un plan j’avais vaguement localisé le lieu. A vrai dire je me demandais pourquoi j’y aller. Sans doute pour être surpris, ne pas rester seul. Bien que rester seul n’aille pas sans me faire plaisir. Je fais parti de ces personnes qui savent très bien s’occuper sans les autres, je trouve toujours des choses à faire. Ce que d’autres appellent ennui fait mon bonheur. Au risque de paraphraser un type illustre mais dont le nom m’échappe pour l’instant, je dirai que l’ennui c’est les autres. Et avec cette Marielle, je craignais tout particulièrement de m’ennuyer.
Alors que je sortais de ma douche, où j’avais à peu près réussi à arrondir les angles avec mon dos, le téléphone retentit dans l’appartement. Instinctivement j’ai décroché, comme toujours, avec agacement. Mais, aux premières paroles qu’elle prononça, je manquai de me retrouver à genoux. Cette voix venait de loin. De si loin… Si mon cœur se mit à battre si fort, si naturellement, on ne m’annonçait aucune mort. Aucune. J’avais l’impression qu’on venait de m’annoncer une résurrection. Le retour de Jessica. Dès lors, absent partout, et surtout avec Marielle, je n’ai passé ma soirée qu’à penser à la suivante, à ce samedi soir qu'il me semble avoir tant attendu et où je dois la revoir, elle, Jessica. Déjà, depuis hier je ne pense qu’à cela, l’essentiel de mes pensées va sur cet unique instant, celui où je vais la retrouver. Je me pose tant de question sur ce qu’elle est devenue, je me demande si je la reconnaîtrais après ces cinq années sans nouvelles d’elle.
L’heure approche, et j’ai l’impression de retrouver mon calme.
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à 21:52